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WAKE UP !

    Laurent Gounelle a écrit son dernier roman – Le Réveil – au sortir de la crise du COVID. Comme chaque année, je me suis précipitée pour l’acheter, j’ai attendu d’être disponible mentalement pour le lire, puis j’ai encore attendu l’événement déclencheur pour en tirer ce petit opus. Gounelle y démonte quelque chose qui fascine l’hypnotiseuse en moi et qui effraie la citoyenne et femme que je suis : les mécanismes d’influence. Ce qui m’a frappée à la lecture, c’est que les mêmes leviers ont continué d’être utilisés lors de la guerre en Ukraine. Loin de moi l’idée de devenir une complotiste permanente, et de nier la souffrance du peuple ukrainien. Mais être lucide, au moins un peu, semble être une posture raisonnable. Et plus largement, Gounelle utilise des mots qui sonnent à mes oreilles, moi qui depuis le 1er confinement dis que l’on vit une expérience de perversion narcissique à échelle planétaire et le vocabulaire idoine s’égrène au fil des pages de mon cher auteur. On a tout vécu : les injonctions paradoxales sur l’efficacité des masques, le fait de nous faire douter de la réalité (gaslighting), nous monter les uns contre les autres dans des triangulations fratricides, le renforcement intermittent à coup de récompenses et de punitions – la fameuse menace de nous reconfiner si on ne se discipline pas de nous-mêmes… et le tout avec le thème parfait à la clé : prendre soin de nous, une sorte d’objectif altruiste national nous faisant tout gober. Peu importe, d’ailleurs, que pour sauver entre autres le 4ème âge des EPHAD on n’hésite pas à sacrifier la santé mentale des générations à venir, dommage collatéral acceptable, choix qui d’ailleurs vient alimenter leur grand scénario sournois : des générations d’individus affaiblis psychologiquement, donc plus manipulables encore ! Chomsky, l’une des références essentielles de Gounelle dans le réveil affirme « Si l’on ne croit pas à la liberté d’expression pour les gens qu’on méprise, on n’y croit pas du tout. » J’ajouterais volontiers la liberté de pensée à celle de l’expression… Peut-être est-il temps de questionner la solidité des fondations de notre si chère démocratie.

    En anticipation fortuite sur l’histoire ultra récente du conflit, Gounelle explique que les manipulations médiatiques remontent à la Commission Creel en 1917, Commission qui avait pour but d’insuffler l’envie de guerre aux américains. Toute ressemblance de l’actualité avec l’origine est malheureusement loin d’être fortuite, comme par exemple le refus de jouer de la musique allemande en 1917, tout comme on a vu l’exclusion des ballets et autres sportifs russes en 2022. Et l’un des membres les plus influents de la Commission de 1917 va transposer les concepts d’influence dans le commerce et la publicité. Partant de postulats que la masse est idiote et qu’il faut décider à sa place, les démocraties ont peu à peu glissé vers un mécanisme imperceptible où une sorte de gouvernement invisible dirige véritablement le pays : le dieu argent et ses lobbys. Des leviers comme nos peurs et nos instincts les plus bas sont leurs manettes les plus puissantes. Notre réflexion, leur plus grand ennemi.

    Gounelle introduit le trilemme de Rodrik, dans lequel nos Etats semblent totalement embourbés, quand des dictatures, elles, ont tranché. Selon l’économiste éponyme, un État doit en permanence choisir entre sacrifier la démocratie, la souveraineté nationale ou une intégration économique poussée (Europe, mondialisation), car elles sont mutuellement incompatibles.  Avec le COVID, la Chine a choisi de sacrifier la démocratie en actionnant à répétition les confinements pour sauver son économie, faisant de ce choix sa camisole dorée. En France, nous voyons fleurir les 49.3 et les tactiques d’obstruction à l’assemblée, jolis prémices de déni de démocratie. Voyons quels choix feront nos Etats suite au conflit russo-ukrainien. Dans une dictature, la démocratie est sacrifiée publiquement. « Dans le reste du monde, il faut s’y prendre beaucoup plus subtilement, et attendre patiemment l’opportunité que peut représenter un événement d’actualité, afin d’obtenir des gens qu’ils renoncent à leur liberté et acceptent d’être de plus en plus contrôlés, jusqu’à aboutir à une situation où la démocratie n’est plus… » Merci Noam (Chomsky, encore… )

    Gounelle fait le parallèle entre ce que l’on a vécu sous le COVID et rien de moins que des techniques tortionnaires chinoises pendant la guerre de Corée, techniques répertoriées dans la charte de Biderman :

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    Moi, pendant que je pouvais sortir grâce à Pepito, je passais mon temps de confinement à dire qu’on subissait une torture, celle de la désorientation sensorielle.

    Rappelons que la privation sensorielle est une méthode de thérapie et détournée en torture psychologique, notamment par la CIA dès les années 50 à partir d’expériences menées par le neuropsychologue Donald Hebb sur ses étudiants volontaires à l’Université de Montréal.

    Cette méthode physiquement non-violente consiste à réduire autant que possible les perceptions sensorielles du sujet par le port d’un casque assourdissant pour le priver de l’audition, d’un bandeau (ou de lunettes) sur les yeux pour l’empêcher de voir et en privant celui-ci du toucher et de l’odorat, puis en l’isolant des contacts humains et des stimulations extérieures (sport, ordinateur…) par l’enfermement dans une pièce étroite. Les effets, constatables au bout de quelques jours, sont des hallucinations comparables à des prises de drogues et aboutissent à une régression mentale et un chaos existentiel insupportable.

    Ce type de torture a été utilisé par la CIA à Guantanamo et en Irak, avec des prisonniers incarcérés en privation sensorielle durant de longues périodes. Les américains n’en ont pas le monopole : le régime des frères Castro, à Cuba, utilise cette technique de torture, et d’autres pays se dispensent même de ce raffinement …

    Depuis plusieurs décennies, de nombreux chercheurs en psychologie ont étudié et élaboré des procédures d’influence du comportement d’acceptation d’une requête. Serions-nous torturés doucement chaque jour, simplement par soumission à des ordres cachés ?

    Parmi ces techniques, la plus célèbre d’entre elles est, très certainement, la technique du Pied-dans-la-Porte. Rappelons que cette technique repose sur le fait que la demande d’acceptation d’une requête-cible est précédée d’une autre demande de requête moins coûteuse. On observe que le fait de faire précéder une requête coûteuse par un petit acte préparatoire prédispose plus favorablement le sujet à accepter la seconde requête. Une expérience pour en démontrer le mécanisme et l’impact consiste à, par exemple, demander à des gens de mettre un grand panneau dans leur jardin enjoignant les conducteurs à rouler prudemment. Dès lors que vous aviez sensibilisé les propriétaires desdits jardins en amont (par un appel téléphonique sur les accidents de la route), vous aviez déjà mis leur cerveau en mode acceptation. Plus jeune, je me souviens qu’un de mes supérieurs pouvait tout me demander dès lors qu’il avait commencé par me féliciter ; ce n’est pas – à mes yeux de la manipulation néfaste, mais du management bienveillant et efficace. En hypnose, on utilise fréquemment la technique du Yes set, qui va aider le client à accepter plus facilement les suggestions. Méthodologiquement, on fait acquiescer le client successivement sur 3 faits qui relèvent d’évidences, et le client sera ensuite plus disposé à accueillir les suggestions hypnotiques et post-hypnotiques (avec effet post-séance).

    Le contraire de cette technique s’appelle la porte au nez. Vous commencez par exprimer une demande très exigeante. Vous allez essuyer un refus. Vous exprimez ensuite votre réelle demande, moins coûteuse, et celle-ci passera comme une lettre à la poste. On a tous, pendant l’adolescence, utilisé cette technique, en demandant l’autorisation de découcher pour finalement obtenir la permission de minuit. Les collecteurs de fonds l’utilisent aussi : puisque le donateur culpabilise souvent de son premier refus, il acceptera par exemple de faire un don unique et modeste au lieu d’être prélevé mensuellement d’un montant faramineux.

    La technique du Low-Ball vise à obtenir d’un individu un accord pour produire un comportement, soit en lui faisant miroiter des avantages qui, par la suite, disparaissent, soit en lui cachant des inconvénients qui surviennent après l’acceptation initiale. Concrètement : dans un premier temps on attire la victime – car il s’agit bien d’une victime de manipulation – par une proposition alléchante. On la laisse réfléchir. Cela induit un certain engagement de cette victime… On révèle alors les inconvénients. Comme la personne s’est déjà engagée, se rétracter lui sera difficile. Du coup, quand on redemande alors à l’individu s’il consent toujours à faire ce qu’on lui avait demandé, le taux d’acceptation est bien meilleur que quand on informe directement – et honnêtement – la personne des vices cachés … le double en fait !

     

    La technique du Leurre repose sur le même principe que le Low-ball, mais on introduit une variation dans la proposition ou demande finale. Cette technique consiste à conduire une personne à prendre une décision afin qu’elle croie obtenir un avantage puis, une fois cette décision prise, on l’informe que les circonstances ont changé et qu’elle ne peut en bénéficier comme elle le pensait. Cette personne est alors incitée à produire un comportement de substitution pour lequel, toutefois, elle ne bénéficie pas des mêmes avantages. Une expérience contrôle, où on fait uniquement la seconde proposition, montre que dans ce dernier cas, seuls 15 % des sujets ont accepté contre 47 % en condition de leurre. Et l’acceptation est encore meilleure quand l’expérience est précédée par un pied dans la porte….Le leurre se retrouve dans notre quotidien de consommateurs, en magasin : un produit phare est annoncé à grands renforts de publicité, mais il est en rupture de stock. L’intention d’achat reste imprégnée dans le cerveau, et le client sera facilement rabattu sur un produit encore en stock.

    Parmi les autres techniques de manipulation, notamment dans les relations toxiques, il y a : le détournement de sujet, la projection, le gaslighting, le renforcement intermittent, la triangulation, les injonctions paradoxales, … et même le silence est une arme détestable.

     

    J’ai récemment découvert, à mes frais, un couple diabolique : la réactance et la psychologie inversée !

    La réactance est un mécanisme de défense psychologique mis en œuvre par un individu qui tente de maintenir sa liberté d’action ou de pensée lorsqu’il la sent menacée. C’est aussi l’attrait du fruit interdit : on veut réaffirmer sa liberté en transgressant ce qui entrave notre liberté. Les vendeurs s’appuient sur notre réactance en jouant sur l’urgence et la rareté : l’offre promotionnelle va bientôt disparaître, les stocks ne sont pas illimités, notre liberté de profiter d’une aubaine semble entravée, et on réagit, on réimpose notre pouvoir d’achat. On risque de manquer de PQ puis d’essence à 10 centimes de moins, alors on se rue pour pouvoir se déplacer ou se décrasser à notre guise.

    Le phénomène de réactance peut faire naître chez l’individu une attitude ou une croyance opposée à celle qui lui est suggérée par la situation … ou par un manipulateur. Dans ce cas, la manipulateur va utiliser la psychologie inversée, une technique d’influence consistant à tenir un discours ou adopter une attitude allant à l’encontre de ce que l’on souhaite en fait suggérer. L’utilisation de la psychologie inversée est une manipulation fondée sur la réactance attendue de l’autre. Nous aurait-on fait un coup de psychologie inversée…. « Vous ne manquerez pas de moutarde….. »

    L’action de ce facteur de réactance expliquerait la résistance aux messages de persuasion, par exemple aux messages de santé publique.

    L’inoculation psychologique a pour but de renforcer la résistance à de futurs contrarguments inacceptables ou à des attaques persuasives. L’inoculation consiste à expliquer les contrarguments d’une opinion (la croyance) d’une personne et lui montrer en quoi le contrargument est faux (la réfutation). Cette inoculation (une sorte de surdité un peu bornée ou une protection, à vous d’en décider) est développée pour protéger ses attitudes et ses croyances existantes. Et là, tout ce que nous venons de vivre avec la pandémie s’éclaire : la réactance des complotistes, la dissonance cognitive imposée par les revirements du gouvernement, les tentatives d’inoculation psychologique des uns et des autres sur les avantages/inconvénients du vaccin…

    Si je compte faire un article sur l’hypnose conversationnelle qui mérite qu’on la découvre car n’est pas seulement en hypnose celui qui consulte, je suis restée ici focalisée sur des techniques aux noms édifiants. Mais Chomsky résume bien ce qui est à la base de toute manipulation : « Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions ou des comportements… »

    Chacun connaît l’histoire de la petite grenouille que l’on place dans une eau que l’on chauffe progressivement et qui réalise la situation quand il est trop tard…. Gardons-la en mémoire, et sachons activer notre réactance à bon escient, loin de tout impact de la psychologie inversée que nous fait vivre notre cher gouvernement. Là où le gouvernement a décidément mal utilisé cette perfide psychologie inversée, c’est sur la vaccination. Que n’a-t-il joué sur la pénurie, que tous se seraient offusqués et rués.

    Quand le 1er confinement a été annoncé, les petites grenouilles que nous sommes ont été plongées directement dans l’eau bouillante. Pourquoi n’avoir pas réagi ? Par l’effet de sidération. Quand on se sent en mode survie, soit on combat, soit on fuit, soit on se fige, soit on se soumet. On s’est figés et soumis, quelques-uns d’entre nous ont été autorisés à fuir quotidiennement pour effectuer leur devoir pour la nation, d’autres ont fui un peu adoptant un chien en urgence…. Mais notre capacité de réflexion a été court-circuitée par ce qu’on appelle une rupture de pattern. Cette technique, utilisée en hypnose, crée une disruption dans le raisonnement et met sa cible dans un état de suggestibilité maximale…

    Et je vous décevrais si je n’abordais pas le poncif d’internet. Les réseaux sociaux nous rendent beaucoup plus manipulables. On finit par être gouvernés par l’extérieur : le nombre de vues ou de likes de nos posts. Le summum des travers de notre système méritocratique : on continue de courir après la validation externe, mais ce n’est même pour reconnaitre le fruit d’un effort ou d’un travail, seulement sur la base de la vitrine que l’on offre au monde… Pauvres de nous !

    Oyez, Oyez ! Une nouvelle grande manipulation est en route dans l’éducation : le énième débat sur les méthodes de lecture n’en finit pas de m’irriter. On voit fleurir des articles criant haro sur la diversité des approches, et préconisant une approche unique par la syllabique. C’est méconnaître totalement le fait qu’il y a deux voies de lecture : l’assemblage syllabique et l’adressage (reconnaissance globale du mot). Un bon déchiffreur seul ne fera jamais un bon lecteur. Pour accéder au sens du texte, il faut aussi accélérer la lecture par de la reconnaissance rapide de mots, notamment ceux qui ne peuvent pas être déchiffrés (est, ….). Il faut aussi aller questionner des textes, car c’est cela lire ! Lire, c’est comprendre, et critiquer le contenu de ce qu’on vient de lire. Je ne peux pas croire que le gouvernement ne connaisse pas cela ; c’est donc une volonté de former des déchiffreurs non critiques qui est en train de se mettre sournoisement en place. Avec une « harmonisation » forcée des méthodes proche de l’endoctrinement. Et on demandera aux enseignants de réduire les autres activités, les activités d’éveil ! Je suis effrayée. Voilà pourquoi j’ai quitté l’Education Nationale : je voulais arrêter de cautionner. Et une phrase de Chomsky traduit ma pensée, mes constats et mes craintes : « Si nous avions un vrai système d’éducation, on y donnerait des cours d’autodéfense intellectuelle. » Puisse cette phrase traduire aussi la suite de mon action, de ma non-résignation. Mon engagement ne s’est pas arrêté avec ma démission. Aujourd’hui, j’essaie d’ouvrir l’esprit des 4000 profs de mon groupe Facebook, je reprends le soutien scolaire pour ramener un peu d’espoir dans les yeux de quelques enfants et je forme des enseignants à ne pas se résigner, à prendre chacun de leurs élèves comme un individu à accueillir et accompagner dans son développement cognitif et émotionnel. Et mon cher Noam de conclure : « C’est la responsabilité des intellectuels de dire la vérité et de dévoiler les mensonges. »

    Je ne sais pas si je suis vraiment une intellectuelle, mais je ne me rendrai pas….

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